Manga Clic - Publicité Habillage mobile

Marika Herzog : une interview autour de Sleepy Boy

26/07/2023 - Taka

Sleepy Boy vous entraine dans monde où vos pires cauchemars abolissent les frontières du réel, votre reflet tente de passer de l’autre côté du miroir et votre oreiller veut dévorer votre entourage. Signé par Marika Herzog, une artiste allemande, la série fut lancée en mai 2023 chez Ankama Editions. Profitant de la présence de la mangaka à Japan Expo, nous sommes allés à sa rencontre pour réaliser une interview.

Découvrez les coulisses du nouveau shonen d’Ankama !

Bonjour Marika, pour commencer, peux-tu nous parler un peu de toi et de la raison pour laquelle tu es devenue mangaka ?

Bonjour, je suis Marika Herzog, je suis née près de Berlin et j’ai intégré une école de sport quand j’étais jeune. J’ai rejoint beaucoup de clubs, comme celui du judo, de la gymnastique, du ballet et j’ai essayé d’intégrer l’équipe olympique de volley-ball. Malheureusement, j’ai dû abandonner car j’ai été obligée de déménager dans un petit village, sans internet, ni rien. Il n’y avait pas d’activités sportives ni de clubs et ma nouvelle école était dans un autre village. J’ai donc pensé à ce que je pouvais faire, à ce que j’aimais. Et puis, j’aimais dessiner, j’aimais créer des histoires, mais je n’avais jamais eu le temps avant… J’ai donc commencé le manga.


En France, nous apprenons à te connaitre grâce au manga Sleepy Boy, mais tu as déjà publié 5 séries, on remarque qu’elles sont plutôt portées vers la fantasy et le shonen, la seule exception serait Whispering Blue. Pourquoi ce choix ?

Oui, j’ai publié plusieurs séries avant. Certaines, avec des éditeurs, d’autres en auto-édition, d’autre ne verront jamais la lumière car elles sont cachées dans mon coin de la honte. [Rire].

En ce qui concerne Whispering Blue, c’était un test.  J’aime beaucoup lire des Boy’s Love mais je ne suis pas une personne qui en dessine. Je ne me sens pas vraiment confiance. Ce n’est pas un univers qui permet de raconter les histoires que je veux. J’aime davantage le shonen qui me le permet.


Comment s’est déroulée ta rencontre avec Ankama ?

C’est une histoire assez drôle pour être honnête. J’ai été invité par une maison d’édition italienne et en même temps par Tony Valente qui était accompagné d’une éditrice d’Ankama, Élise. Durant le diner, Tony est parti pour qu’on puisse discuter.  Je me suis dit « Ok… Au revoir Tony » [Rire] J’ai donc parlé avec Élise et elle m’a donné sa carte pour que je puisse lui envoyer mon histoire quand je serai prête. A cette époque Ankama n’avait pas encore d’artistes internationaux. Deux ans plus tard, je l’ai recontactée : « Salut Elise, peut-être que tu ne te souviens pas de moi, mais je suis là ! »

On peut voir quelques références à Radiant et à Tony Valente dans ce premier tome.

Oui, dans les chapitres et dans la page de remerciements.  La première pierre porte le nom de Tony car c’est grâce à lui que j’ai pu entrer en contact avec Ankama. Tout a commencé grâce à lui.

Le vois-tu comme un mentor, comme un guide ?

Tony est un ami qui m’a beaucoup soutenue. Mais Tony aime aider les autres artistes, c’est vraiment quelqu’un de bien et j’apprécie cela chez lui, il soutient tout le monde.


Comment est né Sleepy Boy et le personnage principal Nate ?

J’avais des croquis. De temps en temps je dessinais juste un personnage au hasard, je m’étais des fissures dans un miroir ou des choses comme ça… Puis j’ai eu envie de mettre ces éléments ensemble, d’une manière ou d’une autre.  J’avais un croquis que j’aimais et j’avais besoin d’une nouvelle histoire… Je me suis alors demandé ce que j’aimais. Comme je suis vraiment vraiment vraiment accro au café, je me suis dit que je pouvais peut-être faire quelque chose avec ça.

L’un de mes croquis représentait un personnage dans un miroir, on pouvait voir une partie normale et une autre qui ne l’était pas… Je connaissais aussi beaucoup de légendes sur le sujet et j’ai voulu utiliser ces éléments en les combinant au café.

Quand on te suit sur les réseaux sociaux, on peut voir ton addiction au café.

Honte à moi [Rire] Est-ce que j’ai une carte de café Starbucks en or ? Peut-être. [Rire] Lorsque je faisais des conventions allemandes des amis m’offraient des cartes de café avec de l’argent dessus [Rire].

Marika Herzog : une interview autour de sleepy boy
Marika Herzog : une interview autour de sleepy boy

Les thèmes que tu évoques les rêves, les cauchemars, les miroirs… se retrouvent dans de nombreux contes et légendes. Où puises tu ton inspiration ?

Je pense qu’il est plus facile d’expliquer pourquoi j’ai voulu cette combinaison. La première fois que je suis accro au café et il est plus facile de dessiner quelque chose que vous aimez aussi ou que vous avez comme dépendance… J’aime également faire des histoires se déroulant dans le monde moderne… Mais je voulais également être libre, avec le dessin, avec les personnages, avec l’humour… C’est pour cela que j’ai choisi les rêves et les cauchemars, ils offrent des possibilités illimitées, parce qu’ils ne suivent aucune règle. Vous pouvez faire ce que vous voulez et j’ai pensé que ce serait intéressant si le monde réel et ce monde sans limitation s’effondraient ensemble.

Et aussi le café était également parfait pour cela. Si vous buvez du café, vous ne pouvez pas dormir… Mais que se passe-t-il quand vous ne dormez pas ?

A l’époque moderne, tout est connecté. Vous obtenez rapidement beaucoup d’informations, les flux des réseaux, les hashtags, les faits divers, tout va très vite et les gens ne dorment pas ou très peu car ils ne veulent rien rater… Ils boivent beaucoup de boissons énergisantes ou de café pour rester alertes.

Dès la première page, tu abordes cette symbolique du temps, notamment avec ces énormes horloges…  Tu dis aussi que les humains sont très occupés. Est-ce une problématique qui te tient à cœur ?

Oui, comme je l’ai mentionné avant, à cause des médias et d’Internet et tout va plus vite… On oublie beaucoup de choses, on oublie d’apprécier ce qui est simple ou de prendre du temps pour soi. Ce n’est pas bon pour la santé, beaucoup de gens en souffrent et je pense que c’est aussi lié au manque de sommeil.


Dans le dernier chapitre, le portail que Nate, Lucian et Alénia franchissent pour rejoindre le marché des rêves à une architecture japonaise traditionnelle tandis que le reste des éléments était moderne jusque-là. Penses-tu t’inspirer davantage du Japon pour la suite ? Pour le décor mais aussi pour le bestiaire.

Il y aura aussi des parties asiatiques dans le deuxième tome. J’ai mélangé ces éléments parce que dans un monde onirique, il n’y a pas de limite. Quand vous dormez votre cerveau traite toutes les informations qu’il a obtenu. Si vous avez vu un documentaire sur l’Asie et un blockbuster américain, votre rêve sera un mélange de tout ça.

La plupart des gens ne se souviennent pas de leurs rêves, mais ceux qui s’en souviennent peuvent confirmer ce processus. Alors c’est pour ça que vous verrez ça aussi dans mon manga.

Stand de dédicaces à Japan Expo

Comment naissent tes personnages ? D’abord l’apparence ou la personnalité ?

Cela dépend. Parfois je me concentre d’abord sur le look, et parfois sur la personnalité. Je n’ai pas de préférence. Les personnages ne sont pas parfaits, je cherche leur problème, je me demande contre quoi ils se battent, quelles sont leurs faiblesses. Je peux créer un personnage à partir de son apparence mais aussi du chemin à parcourir. Ça dépend vraiment du personnage, de la scène ou de l’idée que j’ai en tête. Une fois que mes personnages sont terminés je vérifie que chacun a un point faible, un rêve, un trait de caractère particulier.

Comment se développent-ils ensuite ? Y-a-t-il des conflits ?

Oh, j’en ai parfois mais je pense que c’est bien parce que je les remarque moi-même. Si vous n’avez que des personnages avec lesquels vous êtes à l’aise, ils finissent par tous se ressembler. C’est parfois mieux de créer et de dessiner un personnage avec lequel on est peu à l’aise car sinon tout le monde va dans le même sens.


Connais-tu la fin de Sleepy Boy ?

Je connais la fin. Pour moi, il est important de connaitre la fin. Même si je dois allonger ou prendre des raccourcis, si je connais la fin je sais où aller. Je peux donc mieux changer les choses et l’histoire se déroule mieux. Quand on ne connait pas le but à atteindre, il est plus facile de se perdre.

Après l’interview Marika Herzog a réalisé un magnifique live drawing !

Une interview réalisée et traduite par Manga Clic : Un grand merci à Marika Herzog, aux éditions Ankama et à Japan Expo !

MANGA CLIC - publicité